La Côte d’Ivoire couvre une superficie de 322 463 km2. Au début du XXe siècle, la taille de sa forêt était estimée à 16 millions d’ha soit la moitié du territoire national. Depuis plusieurs décennies, le patrimoine de ses ressources naturelles est en voie de dégradation continue, principalement du fait de l’exploitation à des fins agricoles, forestières, énergétiques et minières.
Cette dégradation, annoncée dès les années 70, s’est d’abord traduite par la disparition de la moitié de la forêt ivoirienne qui est passée à 7,85 millions d’ha en 1990 puis à 3,40 millions d’ha en 2015 (21% de sa superficie initiale). Le taux annuel de déforestation a été de 4,32% (1990-2000) puis de 2,69% (2000-2015).
Ce phénomène massif a frappé toutes les forêts, quel que soit leur statut y compris dans les parcs nationaux et les 231 forêts publiques.
En janvier 2019, la Côte d’Ivoire s’est alors engagée dans la réalisation de l’inventaire national de ses ressources forestières et fauniques afin d’obtenir des informations incontestables nécessaires à la traduction de sa stratégie forestière. L’objectif affiché est de retrouver une gestion durable des ressources agricoles, forestières et fauniques.
Le maitre d’ouvrage de ce projet, d’une durée de 2 ans et demi, a été le Ministère des Eaux et Forêts Ivoirien (MINEF). Il a été financé par un contrat de conversion de dette par l’Agence Française de Développement. A l’issue d’un appel d’offres international, ONF International (ONFI) a été chargé de conduire l’opération en partenariat avec l’IGN. Deux Ingénieurs forestiers français, Pascal CUNY (indépendant) et Françoise PLANCHERON (ONF) ont porté cet inventaire sur place. La collecte physique des données forestières a été assurée par les agents de la SODEFOR (ONF ivoirien), celles de la faune par l’OIPR (OFB ivoirien). A cela s’est ajouté une enquête socio-économique effectuée auprès des populations habitant autour et dans les forêts.
Les résultats, présentés à Abidjan en juin 2021, ont mis en lumière les constats suivants.
Les terres forestières ne représentent plus que 9,2% du territoire, donc 2,97 millions d’ha.
Beaucoup de forêts classées ont disparu pour laisser place à des cacaoyères, de l’anacarde (noix de cajou) voire de l’hévéa ou du palmier à huile, bref, des cultures d’exportation.
Ce qui reste de forêt est exsangue. Les arbres ayant un intérêt commercial ont déjà été prélevés. La surface terrière de ceux qui restent est insuffisante pour assurer leur renouvellement. L’industrie du bois de Côte d’Ivoire n’a plus de ressource durablement exploitable.
Conséquence logique de la déforestation, la faune et la flore de Côte d’Ivoire sont en train de passer sous un seuil critique. Au rythme actuel de déforestation et de dégradation, la couverture forestière sera inférieure à 2 millions d’ha en 2035 et de nombreuses espèces auront disparu y compris peut-être les éléphants. Les conséquences, en termes de biodiversité végétale et animale, de climat (en particulier de régime de pluies donc d’impact sur le climat des pays voisins), de stockage de carbone, deviennent un enjeu national et international qui dépasse la seule réponse de l’Etat ou de la société ivoirienne.
La démographie de la Côte d’Ivoire et l’immigration en provenance de pays voisins, constituent un facteur aggravant.
Le Ghana et le Togo souffrent de maux proches ou identiques. C’est en fait toute l’Afrique de l’Ouest qui est menacée de voir disparaître sa forêt.